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essai fcb

Sur l’usage de l’humour noir dans la com. Étude de cas.

Entrons dans les méandres de la communication responsable, au regard du récent débat soulevé par la campagne de SYNADIS Bio. Un humour bien noir qui a fait grincer des dents!

Je vous partageais dans la sélection com de février cette campagne qui m’est apparue d’un bon ton cinglant. Il se trouve que cette campagne a fait l’objet d’une plainte et d’un avis récent du Jury de Déontologique Publicitaire (JDP), publié le 4 mai. Il m’a semblé intéressant de revenir sur ce cas concret.

Commençons donc par l’objet « du délit » ! :

On pouvait se douter que ce spot n’allait pas plaire à tous ! En l’occurrence à l’association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (INTERFEL) qui a donc porté plainte auprès du JDP (qui est l’instance de contrôle de L’ARPP, l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité).

Pour entamer la partie et entrer dans le sujet, parcourons les arguments d’ INTERFEL

La promotion des pommes issues de l’agriculture biologique des membres de SYNADIS Bio se fonde sur le dénigrement de ses concurrents, en l’occurrence les produits bio distribués par d’autres filières (comme la grande distribution) et l’agriculture conventionnelle «  pleine de pesticides ». La publicité porte également préjudice à l’image des « petits » producteurs, un terme vu comme dégradant et qui ne reflète pas la réalité des relations commerciales de la filière.

→ Faisant référence à l’article 12 du code de la Chambre de commerce internationale (ICC), selon lequel « la communication commerciale ne doit pas dénigrer une quelconque […] activité industrielle ou commerciale, une profession ou un produit ou tenter de lui attirer le mépris ou le ridicule public »

Cela entraîne un risque de tromperie auprès des consommateurs et crée de la confusion sur l’innocuité des fruits issus de l’agriculture conventionnelle, ou sur la « qualité » des produits bio selon les filières.

→ faisant référence à l’article 5 du Code ICC, selon lequel « la communication commerciale doit être véridique et ne peut être trompeuse » et l’article 3, aux termes duquel « la communication commerciale doit être conçue de manière à ne pas abuser de la confiance des consommateurs ou à ne pas exploiter le manque d’expérience ou de connaissance des consommateurs (…)».)

Le spot peut in fine aboutir à porter préjudice au développement de la consommation des fruits et légumes frais, pourtant reconnue comme enjeu de santé publique.

Ces accusations rappellent les manquements à ces autres recommandations et organismes de conseil en vigueur dans le secteur de la publicité :

Point 1.1 des Recommandations ARPP relatives au développement durable selon lequel une publicité « ne doit pas induire le public en erreur sur la réalité des actions de l’annonceur ni sur les propriétés de ses produits en matière de développement durable »

L’ARPP avait conseillé au préalable de la diffusion de ce spot de ne pas inclure « la scène présentant l’homme entrant dans la voiture et traversant un champ ne peut être conservée en l’état : il s’agit d’un espace naturel. Ce type de comportement contrevient à la Recommandation Développement durable ainsi qu’à l’article L.362-4 du code de l’environnement ». Or cette scène a été conservée.

À la recommandation de l’ARPP relative aux « Comportements alimentaires » qui prévoit notamment que « la publicité doit éviter de représenter des comportements contraires aux dispositions déontologiques relatives au développement durable, en présentant des scènes incitant au gaspillage alimentaire ».

Voilà, on a fait le tour des arguments.

Voyons maintenant la réponse de SYNADIS Bio

La campagne « n’a aucunement pour objet de dénigrer la filière des fruits et légumes frais (mais) de caricaturer certaines pratiques contre lesquelles le SYNADIS estime être en droit de s’élever, afin de préserver les valeurs communes à ses adhérents (…) 

Les engagements qui découlent de cette campagne se réfèrent au manifeste et cahier des charges de SYNADIS Bio, et pour autant, se distinguent clairement des autres circuits de distribution de produits biologiques, moins regardant sur la provenance non locale des produits, l’utilisation de serres surchauffées, de lutte contre le suremballage, de relations éthiques entre partenaires ou encore de modes de transports plus écologiques. Un lien vers les engagements de SYNADIS Bio était d’ailleurs présent dans la campagne.

Ainsi, il n’y a pas de généralisation ni de dénigrement concernant la grande distribution ou les agriculteurs dans son ensemble. Le slogan de la campagne allait dans ce sens « Pour certains, le bio n’est qu’une étiquette ». Ce sont bien les mauvaises pratiques qui sont visées, autant que la nécessité de créer un débat, un droit qui relève de la liberté d’expression.

Enfin, le caractère caricatural des personnages entraîne plus à dénoncer qu’a soutenir de tels comportements, notamment sur l’usage de la voiture en fin de spot ou le rejet au sol d’une pomme tout juste cueillie.

Signalons au passage qu’aucune plainte n’a été émise par un consommateur ou un agriculteur.

Alors.. Quelle décision a prise le JDP ?

Le jury a effectivement estimé que la campagne est entièrement fondée sur le dénigrement, et pour autant va à l’encontre de l’article 12 du code ICC.

Toutefois, aucune autre allégation n’a été retenue.

Le caractère volontairement caricatural du spot défausse le non respect de l’image des producteurs, ou encore des comportements non écologiques.

Enfin, il n’y a pas tromperie, défaut de véracité ou de loyauté envers le consommateur à l’égard de la production bio puisque le spot ne dit pas que les pratiques mentionnées sont généralisées à l’ensemble du secteur.

 

Voilà, j’avoue pour ma part être aligné avec la ŕeponse du JDP, dans la mesure où elle renvoie aux engagements des membres du SYNADIS, et lance le débat sur la nécessité de meilleures pratiques dans le secteur.

Qu’en pensez-vous? N’hésitez pas à partager votre opinion sur twitter.

Et pour finir une dernière image.. en forme de 😉

Vous avez aimé? Faites-le voyager!
Alexandre Durrande

Alexandre Durrande

Concepteur-rédacteur freelance spécialisé dans l'alimentation et la restauration durables. Face aux challenges que repŕesente la transition écologique de l'agriculture et de l'alimentation, la com est un pilier central pour sensibiliser les acteurs et les citoyens. Ce blog souhaite apporter des réflexions, des inspirations et des actions concrètes pour s'y mettre.

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