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Analyse de deux études d’envergure sur la restauration durable

Récemment sont sorties deux études importantes venant d’entités de référence. j’ai voulu en tirer les grandes lignes. Quels sont les enjeux, les freins et quelles actions sont à recommander. Analyse.

 

Le rapport intitulé « Révolution(s) en cuisine(s) » de l’agence Utopies est un formidable travail sur les tendances de la restauration durable, et partage de nombreuses expériences, en France ou ailleurs. Un beau cadeau (ou gâteau!) pour ancrer les actions sur le terrain et s’inspirer en montrant que la restauration durable est bel et bien en train de prendre de l’ampleur.

On ressort de sa lecture avec une vision, une photo assez globale du secteur. Il souligne les freins, tels que le manque d’application des lois en vigueur ou d’investissement des enseignes pour entraîner le secteur, mais surtout il détaille les voies et raisons pour lesquelles s’embarquer dans le durable.

Le rapport « Mon restaurant passe au durable », corédigé par Metro (voir son programme spécifique) et Green Cross, a le mérite de poser les bases d’une restauration durable. Il souligne les grandes lignes, depuis le constat de l’urgence écologique et sociale jusqu’aux nouvelles tendances des consommateurs, afin de cibler les principales actions à mettre en marche. C’est clair, bien synthétisé, et va à l’essentiel. En somme, vous y trouverez donc des infos et des conseils afin de se lancer, pour notamment:

Ensuite, en mettant en vis-à-vis ces deux rapports, on peut également faire ressortir des lignes de fond communes, une insistance nette sur certaines thématiques… auxquelles j’ai souhaité apporter mon grain de sel !

Booster l’ambition du secteur pour être moteur de la transition agricole et alimentaire

Affichée plus clairement dans le rapport d’Utopie, se dessine derrière la volonté de renforcer la consommation responsable en circuits courts une ambition plus forte : transformer le secteur agroalimentaire.

Une ambition qui, à première vue, peut paraître difficile mais qui pourtant a le mérite de fixer un cap, notamment pour renforcer l’autosuffisance alimentaire (en particulier celle des villes). C’est la défense d’un nouveau modèle agricole, basé sur l’agroécologie, qui est en jeu, tel que le rappelle Green Cross, partenaire du rapport de Metro. La forte contribution au changement climatique, la pénurie en eau, tout comme la dégradation des sols ou la perte de biodiversité sont déjà des enjeux extrêmement préoccupants pour le secteur.

Recentrer la consommation sur les saisons de nos territoires

Cet axe stratégique prendra d’autant plus d’ampleur s’il est expérimenté et appliqué au niveau des territoires. À l’échelle d’une ville, il est plus facile d’expérimenter avec des initiatives pionnières sur le terrain pour ensuite les généraliser à un niveau plus macro.

«  2% des produits alimentaires consommés localement sont issus du territoire, pour les 100 premières aires urbaines françaises » selon une étude signée UTOPIES

Cet ancrage territorial est cité également comme une clé de voûte dans le rapport de Metro. Les cuisinier(e)s de demain (et d’aujourd’hui) doivent baser leurs menus sur les produits de saison de leurs territoires, en favorisant les circuits courts. La saisonnalité, grande perdante de la révolution verte, devient un critère essentiel pour engager une vraie rupture dans la restauration et l’alimentation en général. Elle présente d’ailleurs de nombreux avantages, tel que souligné par ce rapport.

Le rapport d’Utopies met également en avant un concept innovant de restaurant(s) : les food courts. Ces nouveaux lieux urbains de consommation centrés sur la diversité culinaire en mode street food peuvent présenter, comme on le voit déjà pour certains, des atouts intéressants en termes de sensibilisation à une alimentation durable et de pratiques plus circulaires.

La végétalisation de notre alimentation

Un autre axe essentiel, bien mis en valeur dans le rapport de Metro (plus dilué dans celui d’utopies). Un grand défi culturel tout d’abord, pour les consommateurs et les cuisinier(e)s, et créatif, pour toute la profession. Il faut insister sur l’offre végétarienne, la rendre plus diverse, créative et appétissante. Il y a une vraie nécessité de formation, tel que le rappelle la Fondation pour la Nature et l’Homme avec le Bonus Bio et Local. L’enjeu en terme de santé publique et d’urgence climatique est immense quand on prend mesure de l’impact de la surconsommation de viande. Le rapport de Metro rappelle les bénéfices des protéines végétales, en soulignant notamment l’accord magique : légumineuses+céréales.

Voir cet article pour aller plus loin: Problèmes et solutions sur la consommation de viande

Mais la réalité du terrain peut vite nous rattraper...

Maintenant de tels changements choquent bien souvent avec la réalité économique et sociale difficile du secteur. Les dures conditions de travail, et bien souvent le manque de temps et de formation sont des freins inhérents à la profession. L’une des clés passe sans doute par la formation aux enjeux du développement durable, à laquelle doit s’ajouter une évolution du contexte professionnel pour diminuer la pénibilité et favoriser une meilleure répartition du temps de travail (notamment entre vie privée et vie professionnelle). Le rapport de Metro lance quelques pistes intéressantes, prônant un nouveau management plus humain, participatif et horizontal, tel qu’une carte coconstruite entre les chef(fe)s et l’ensemble de l’équipe, ou le renforcement du lien entre la cuisine et la clientèle.

Le manque de clarté des lois en vigueur (ou à venir) pose également souvent problème, comme le souligne Utopies en mettant les pieds dans le plat d’entrée de jeu !

Le rôle social du restaurateur

On touche là indirectement une autre branche, souvent sujette à confusion ou réprobation, qui est celle de renforcer le rôle social du restaurateur. Soit, tel que rappelé par Utopies, la volonté à devenir « un lieu d’échanges et d’engagement au-delà de la simple consommation alimentaire », pour « répondre aux besoins de lien social et d’engagement politique et civique exprimés de façon croissante par les citoyens ». C’est un frein souvent évoqué par les restaurateurs qui ne souhaitent pas associer leurs marques à quelconque forme d’engagement. Pourtant, le rapport de Metro nous le rappelle, l’enjeu est vital pour embarquer la profession. On ne peut que trop conseiller aux restaurateurs de « communiquer sur les actions écoresponsables, développer des partenariats avec des associations, former et sensibiliser le personnel aux techniques durables, recueillir leurs idées et retours d’expériences et partager les bonnes pratiques avec ses confrères ».

Agir et communiquer, un duo gagnant

Agir et communiquer son engagement est pourtant vital pour engager le secteur dans la transition et sensibiliser les clients. Ces derniers sont demandeurs, devenant de plus en plus des consomm’acteurs, comme le souligne le rapport de Metro: « Même si le plaisir gustatif demeure le principal critère pour aller au restaurant, la traçabilité, la provenance locale et l’achat responsable des produits, l’engagement environnemental du restaurant, les nécessités de nouveaux régimes alimentaires (sans gluten, végétarien, flexitarien, etc), marquent une évolution claire que les restaurateurs doivent désormais prendre en compte. »

De son coté, Utopies, suite à une dernière étude, nous montre que cet engagement peut clairement représenter un avantage économique : « la prise d’engagements forts et visibles est un facteur multiplicateur de l’intention d’achats en restauration, multipliée par 3,35 lorsque la positivité des enseignes de restauration est perçue. »

La transparence, un gage de confiance

Les restaurateurs devraient au moins se poser la question de comment communiquer avec plus de transparence sur l’origine et les modes de production de leurs produits. L’attente des consommateurs est forte à ce niveau. À l’instar de la grande distribution qui cherche à nous rassurer en montrant l’amont agricole de leurs produits, il y a de nombreux avantages à être plus transparent.

Pour aller plus loin : Placer l’origine des produits au coeur de votre communication

Rappelons que les consommateurs sont aussi en attente de labels. L’offre en restauration durable gagne d’ailleurs du terrain, tel que le montre Utopies (il y a un même un beau classement de tous les labels existants)

Alors, comment changer d’échelle ?

La fameuse question que nous nous posons tous et toutes. Là-dessus, le rapport d’Utopies apporte des réflexions intéressantes. Tout d’abord, ne plus se contenter des gammes vertes de certaines enseignes qui ne produisent pas plus d’efforts que ça pour étendre les principes de développement durable à toutes leurs gammes. Ou encore celui de développer le « choice editing », qui consiste à proposer par défaut l’offre la plus durable.

Une autre voie passe notamment par clarifier certaines réalités, voire mythes qui polluent la transition, tels que la durabilité qui serait bien trop coûteuse. Là-dessus, il est évoqué le rapport de l’Observatoire national de la restauration collective bio et durable qui a pu démontrer que manger bio ne coûte pas forcément plus cher. Pour la restauration non collective, plusieurs axes majeurs sont aussi cités pour baisser les coûts : la réduction de protéines animales, l’augmentation des produits bruts de saison, une meilleure gestion contre le gaspillage alimentaire.

Autres infos à retenir

Voir en annexes du rapport « Révolution(s) en cuisine(s) :

– Récapitulatif des lois à venir (et en cours)

– Récapitulatif des labels de restauration durable

Du rapport « mon restaurant passe au durable » :

Ce bon graphique qui résume à quels niveaux se produit le gaspillage alimentaire (cliquez sur l’image)

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Alexandre Durrande

Alexandre Durrande

Concepteur-rédacteur freelance spécialisé dans l'alimentation et la restauration durables. Face aux challenges que repŕesente la transition écologique de l'agriculture et de l'alimentation, la com est un pilier central pour sensibiliser les acteurs et les citoyens. Ce blog souhaite apporter des réflexions, des inspirations et des actions concrètes pour s'y mettre.

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